samedi 14 février 2009

Bare, a pop opera

Il y a plusieurs façons de faire un spectacle sur la jeunesse :
on gribouille un scénario débile, on fait s'agiter sur une chorégraphie formatée et navrante une troupe de post adolescents siliconés et interchangeables au son d'une musique de supermarché, on promeut le tout à grand renfort de publicité parce qu'on est un grand groupe de l'industrie du divertissement et on a l'affligeant "High School Musical 1,2,3,4,5...37,38" etc !

On peut aussi adapter courageusement une pièce de théâtre allemande de 1880, scandaleuse à son époque et encore controversée de nos jours, qui parle de l'éveil des jeunes à la sexualité (homo et hétéro) et à la cruauté du monde adulte. On fait un carton sur Broadway et c'est mérité car on a une bonne musique et de jeunes interprètes de qualité :
"Spring Awakening"
n'a pas usurpé son succès !

Enfin, et c'est ma préférée, on est un petit couple gay, issu d'une high school catholique nord américaine, et on utilise sa propre vie pour faire un "musical" original !

Si les deux créateurs, Damon Intrabartolo et Jon Hartmere ne sont plus ensemble que pour le travail artistique, c'est bien leur coup de foudre adolescent qui a servi de matière première à "Bare, a pop opera" !Synopsis :
Peter et Jason sont secrètement amants; secrètement car Jason est le leader de l'équipe de football et tient à sa réputation de séducteur...de minettes !
Peter lui, ne demande qu'à crier son amour sur les toits et à assumer au grand jour...

La jolie et peu farouche Ivy est amoureuse de Jason. Matt, un autre élève de leur classe, en pince pour Ivy !
Effrayé par l'enthousiasme de Peter, Jason, juste avant les vacances de Noël, va céder aux avances d'Ivy, alors que Peter, un soir d'alcoolisation un peu poussée, va confier la vérité à Matt...A la fin de l'année scolaire, Ivy se découvre enceinte de Jason. Matt, jaloux, crache le morceau en public : Jason est gay !Dépité par la trahison de son amant, Peter le plaque ! Jason, de son côté n'assume pas ses responsabilités et découvre en écoutant Ivy plaider son amour pour lui, que ce qu'il entend exprime précisément ce qu'il ressent pour Peter !
Avant la représentation de "Roméo et Juliette" - que la classe a répété toute l'année pour la fête de remise des diplômes - Jason demande à Peter de partir avec lui. Peter lui répond qu'il ne veut plus fuir et le repousse.
Désespéré Jason avale une dose mortelle de GHB et pendant le spectacle, embrasse Peter sur la bouche et succombe dans ses bras.La remise des diplômes est l'occasion pour tous de s'interroger sur leur rôle dans le drame et sur l'existence qui les attend...
Des esprits chagrins ont dit que l'histoire véhiculait un certain nombre de clichés :
homo refoulé, école catholique, parents inattentifs à leur progéniture, prêtre réac, nonne au grand coeur...
Ben oui, comme toutes les histoires (presque) vraies, celle ci a son lot d'idées reçues ou qui semblent telles à ceux qui n'en connaissent pas la réalité.

Bien sûr c'est une tragédie, mais je préfère y voir une parabole d'espoir : Pour vivre heureux, vivons vrais !
Ce qui tue Jason, c'est de ne pas avoir cru en la force de ses sentiments pour Peter.
Il n'a pas voulu imaginer qu'à eux deux ils pouvaient bousculer le Monde !
Il a préféré l'apparence, l'image que les autres lui renvoyaient de lui même !
C'est d'avoir cédé au conformisme, d'avoir refusé de poser le pied en dehors du chemin balisé par ses copains, sa famille et les prêtres...
D'avoir pensé que se renier est la meilleure solution pour être heureux !

Jason s'est tué d'être déjà mort !

Banal ça ? Pour des ados chez qui le conformisme est une seconde nature et l'esprit grégaire un absolu, c'est révolutionnaire !

Des textes en langage d'aujourd'hui, avec des gros mots, des fautes de syntaxe, une musique variée, qui va de la balade pop à la soul en passant par le bon vieux rock, des chanteurs frais, convaincus et crédibles, font de "Bare" une jolie peinture, intemporelle, de la jeunesse et de sa découverte de l'amour...
J'aime bien quand les créateurs font preuve d'originalité et ne se contentent pas d'adapter, même avec talent, les idées des autres...
Et si j'aime mieux que les histoires gay finissent bien, celle ci est vraiment très attachante...





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